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Zone Blanche (Nouvel Observateur Novembre 2010)
La Fibre Optique pour tous aurait pu être la solution car elle va se développer mais en parallèle avec les Hotspots wifi qui polluent villes et villages en cette fin 2011.
Une évolution malheureuse récente sur le site des EHS
Tentatives de 2010 pour obteniir une Zone blanche en Drôme
Le Nouvel Observateur en Novembre 2010
Les électrohypersensibles (EHS)c'est le nom de ces nouveaux malades allergiques aux ondes électromagnétiques. Certains quittent tout pour se réfugier dans la Drôme, au cœur de la forêt de Saoû. Loin du wi fi et des antennes relais, ils vivent ensemble, comme des ermites. Reportage:
La rendez vous fixé sur une aire de repos de la départementale 538, à trente minutes de Valence. Ambiance polar. Retrouver des électrohypersensibles EHS, dans le jargon , c'est un peu comme traquer des indépendantistes corses dans le maquis. Intolérants aux ondes électromagnétiques, portables, wi fi et autres, les EHS sont en effet tricards sur 99,5% du territoire. Alors ils sont contraints de fuir. En permanence. Et sont donc difficilement joignables. Sur le forum electrosensible.org, à la rubrique << nous contacter », ce message prévient: Notre capacité d répondre est limitée, car les membres du collectif ne peuvent pas passer trop de temps sur un ordinateur, ils sont eux-mêmes électrosensibles...
Sur l'aire déserte, une voiture bleu nuit attend. Serge Sargentini, bientôt 70 ans, ancien officier de réserve spécialisé dans les radars, est déjà là. Boule à zéro à la Kojak, tout de noir vêtu: c'est lui qui nous emmène au QG des EHS. Une zone blanche. Bref, un endroit «purifié» des ondes où le portable ne passe pas et où le wi fi est encore un acronyme barbare. Serge est un ( EHS modéré ), comme il dit. Il nous enjoint même d'appeler avec notre portable et dégaine son appareil mesureur d'ondes: ~ Vous avez vu comme ça monte ? Ça fait peur, Non ?)) Il a arrêté de vivre dans son duplex de Crest, ~ à cause des réseaux Wi fi )). Le soir, il va dans la zone refuge pour se ressourcer.
Ce petit bout de Drôme, caché par les montagnes du Vercors, est désormais connu de toute la communauté des EHS: cet été, plusieurs centaines d'entre eux ont défilé dans ce havre de paix garanti sans ondes, certains venant même des Etats Unis ou d'Allemagne. "C'est un endroit rare. n y a de moins en moins de zones blanches, tant le territoire est quadrillé d'antennes", dit Serge. Première étape, la zone refuge, qui sert de sas de décompression. Serge tend une boîte métallique fermée où déposer les téléphones, déconnectés. Nous sommes dans une zone à très faible rayonnement magnétique. C'est ici que les EHS vont se décontaminer. Il y a là plusieurs caravanes entièrement tapissées d'aluminium, fenêtres condamnées, pour se reposer, toilettes. Ainsi que des sortes de fontaines d'eau pour se "décharger" de l'électricité du corps. Serge rêve un jour de faire entrer dans les lieux internet, grâce à la fibre optique "une technologie saine. On n'est pas des ermites: internet, c'est fabuleux, c'est le wi-fi et tous ces gadgets sans fil qui nous polluent". A quelques kilomètres de la zone refuge se trouve le Graal: la :forêt de Saoû qui, elle, est encore plus protégée grâce au cirque de montagnes qui l'entoure. Là, dans un parking, la petite cohorte de réfugiés des ondes s'est organisée, façon « Koh Lanta ». On cherche l'eau à la fontaine, à deux kilomètres à pied. On se ravitaille en descendant au village, dans le camion tapissé d'aluminium...
Refuge dans les grottes
Des fous ? "Moi même, c'est ce que j'aurais pensé en nous voyant", confesse Philippe Tribaudeau, 49 ans. Enseignant en technologie à Dijon, Philippe avait comme tout le monde un téléphone portable, internat... Et puis, "au printemps 2008, les symptômes se sont déclenchés. Dans ma salle de cours, j'étais encercle par une dizaine d'ordinateurs. Un jour, mes bras se sont mis à me brûler. " Au bout de quelques mois, Philippe se met en congé maladie. Commence à tout détrancher dans son appartement. Wi fi, téléphone sans fil et même les ampoules: "Je gardais juste un peu de courant pour le frigo;Pour ma compagne, c'était pénible." La situation se complique quand les réseaux wi fi commencent à éclore un peu partout dans le voisinage. Philippe part quelquefois dormir dans les bois, loin de ces ondes qui le rendent fou. "Puis ils ont installé en 2009 du Wimax, une espèce de super Wifi en Bourgogne. Et là, c'est devenu intenable. J'ai du me résoudre à partir de chez moi )) Commence alors une longue errance sur les routes de France, parqué dans son camion blindé. Philippe trouve refuge en Auvergne, puis dans des grottes près de Gap, un "plan" donné par la communauté EHS. Il y passe son premier hiver avec Anne Marie, une autre EHS. "Mais je voulais voir le ciel." Il met alors le cap sur la Drôme. Cela fait un an qu'il vit en forêt de Saoû. Anne Marie est restée dans la grotte. Où l'ont rejointe trois autres femmes atteintes du même syndrome. "Elles, elles n'arrivent même plus à se déplacer sur les routes, explique Philippe. Trop de lignes à haute tension, d'antennes. Alors elles se sont coupées du monde."
Les EHS le disent tous: le pire, c'est la solitude. "On vous prend pour un dingue'), dit Bernard, un informaticien de 40 ans. Lui aussi a dû quitter son job chez Bouygues. Il a changé d'appartement plusieurs fois. Trouvé une maison dans le Perche. Et puis, boum, les voisins ont installé une box. Lui aussi s'est acheté un camion et a appris à vivre sur la route. Il vit sur ses économies et sur ses indemnités de chômage. Bernard dit " sentir les antennes". Mais comme il est "un esprit scientifique ", il ne quitte jamais son mesureur d'ondes. "Quand je me sens mal, hop, je le sors, cela me rassure de pouvoir identifier les causes de mes symptômes. "
« Tenue de martienne »
A Saoû, les EHS se sont tous retrouvés cet été. "On voit qu'on n'est pas seul, ça fait du bien", dit Isabelle, une quadra, mère d'un garçon de 17 ans, qui habite Lyon. Chez elle, Isabelle a tout équipé pour "survivre ". Tapissé les murs d'aluminium. Construit une espèce de baldaquin autour de son lit pour "faire cage de Faraday ". Mais œ n'était plus assez. Depuis un an, elle « a déménagé toute la chambre à la cave». Elle y dort désormais, recluse Quand elle sort de chez elle elle s'enveloppe de tissu blanc en fil d'argent, "une tenue de martienne". Désormais, il n'y a que dans le refuge de Saou qu'elle se sent vraiment mieux. Depuis la rentrée scolaire, elle fait donc des allers retours entre Lyon et la Drôme. Comme Béatrice, venue de l'Ain, qui a laissé son compagnon derrière elle. "On venait d'acheter une maison, mon job d'éducatrice me plaisait bien. Mais j'étais obligée de dormir dans une caravane dans un pré. "
Les réfugiés de Saoû rêveraient de reprendre une vraie vie. Philippe a demandé un poste au Cned: "Je pourrais corriger des copies à distance!» Serge Sargentini, lui, se démène pour réaliser son rêve: construire un bio village dans une zone blanche, où les EHS pourraient vivre normalement. "On a trouvé le lieu. Mais la commune refuse de s'engager à ce que la zone reste préservée des antennes et du wi fi" Les réfugiés des ondes sont donc condamnés à la fuite, encore. Ils viennent de se faire expulser du parking de la forêt de Saoû pour "camping illicite". Philippe a emmené sa troupe un peu plus loin, un peu plus haut. Dans les montages du Vercors. Les sommets sont déjà enneigés. Il va falloir passer l'hiver
.Une vraie maladie?
Les électrohypersensibles ne sont plus considérés comme des fous. Le ministère de la Santé a reconnu l'an dernier l'existence de cette pathologie. Et demande à l'hôpital Cochin de mettre au point un protocole de prise en charge et une étude épidémiologique. «Les souffrances sont réelles. En revanche, personne ne peut démontrer une corrélation avec les ondes », souligne son responsable, le professeur Choudat. Même constat en Belgique, où une étude a également été menée sur une centaine d'électrosensibles. « Sur les ondes générées par les lignes à haute tension, il semble qu'il y ait une corrélation, très faible, mais réelle, avec une recrudescence des leucémies chez l'enfant En revanche, rien n'a été démontré sur les ondes des GSM et wi fi » dit Luc Vershaeve, du BBEMG. Dans ce flou scientifique des médecins cependant ont pris position pour appliquer le principe de précaution. C'est le cas du professeur Belpomme de l'Artac (Association de Recherche thérapeutique anticancéreuse), qui a ouvert une consultation spécialisée sur le sujet: « Cinq cents patients sont venus me voir en un an ! C'est une base importante qui nous a permis d'analyser cliniquement les symptômes du syndrome d'intolérance aux champs électromagnétiques. L'encéphaloscan est un examen performant: on trouve quasiment à chaque fois une altération de la zone limbique du cerveau, l'un des symptômes qu'on trouve dans la maladie d'Alzheimer. Beaucoup moins grave car elle est réversible. » En revanche, le professeur Belpomme n'a toujours pas trouvé la raison pour laquelle certains développent cette pathologie et d'autres non. «il y a certainement un facteur génétique. L'exposition environnementale joue aussi. La plupart des EHS que j'ai vus ont été à un moment très exposés. Leurs symptômes s'aggravent progressivement avec un abaissement du seuil de tolérance. » D. B.
Nouvel Observateur 18-24novembre p102 -104